Anne de Chivré et Anne Vallée

(ca 1621 - avant 13/05/1653) - 20ème génération
fils de Henry et Antoinette de Carbonnel
Branche de la Barre

Anne de Chivré voit le jour vers 1621, durant le règne de Louis XIII. Il sera suivi d’un frère Henry vers 1625. Dans sa prime enfance, il a le malheur de perdre sa mère en 1626.
Suite au remariage de son père avec Françoise Mare’ch de Montbarot cette même année, il aura un demi-frère Gédéon et une demi-sœur Françoise.

Très vite, il suit les traces de son père dans l’armée et se retrouve au siège de St Omer en juillet 1638 dans le cadre de la guerre de Trente Ans. Alors que son père y trouve la mort, Anne est blessé comme le relate la ‘Gazette de France’ du 17 juillet 1738 : « Le fils du marquis de la Barre, âgé de seize ans, y reçut une mousquetade à l’oreille et y parut digne fils d’un si brave père dont les mérites ont aussi été reconnus en la personne de son dit fils par le grand maître de l’artillerie qui lui a donné purement la charge qu’avoit son père de lieutenant général de l’artillerie de France »[1].  
Fin septembre, Anne de Chivré se trouve toujours dans le Pas-de-Calais comme en atteste un écrit du 30 septembre 1638 : « En la présence des notaires soubsignez, résidens en ceste ville de Monstroeuil, sont comparus … Jacques Deschauffour, conducteur de l’artillerie dans l’équipage de M. le Marquis de la Barre, de présent en ceste ville … »[2]

Quelques années plus tard, à 21 ans environ, il succède à son père en recevant la charge de lieutenant général de l’artillerie le 10 janvier 1643. 

A ce titre, il participe aux côtés de Louis II de Bourbon duc d’Enghien, le futur ‘Grand Condé’, à la bataille victorieuse de Rocroy opposant les français aux espagnols, le 19 mai 1643, 5 jours après le décès de Louis XIII. Contrairement aux écrits d’Henri d’Orléans duc d’Aumale  sur cette bataille, Anne de Chivré y fut peut-être blessé mais en aucun cas tué[3].

La succession de son père Henry de Chivré, marié trois fois, amène de nombreuses contestations et procès notamment le 25 mai 1643, sous l’autorité de Claude Chrestien son curateur, pour une dette de « quatre billets de quatre mille livres… »[4], le 6 juin 1643 pour une transaction avec Charles de Montesson au sujet de la jouissance de la terre du Plessis-Bourel[5] et un peu plus tard vers 1651 pour défaut de paiement des revenus des terres de la Barre et du Plessis-Bourel à Louise de Fleurigny épouse en troisièmes noces d’Henry[6].

Quand Anne n’est pas sur les champs de bataille, il demeure le plus souvent au château de l’Arsenal à Paris prêt à répondre à toute réquisition.
Cest ainsi qu'il rencontre Hector Vallée, contrôleur général de l’ordinaire des guerres. Le 30 mars 1645, pendant la régence d’Anne d’Autriche secondée par son ministre le cardinal Mazarin, Anne de Chivré marquis de la Barre, environ 24 ans, prend pour épouse au temple de Charenton Anne Vallée (de gueules au chevron mi parti d’or et d’argent à trois étoiles d’argent 2 et 1) fille d’Hector et de Suzanne Bigot. Les Vallée, « bourgeois d'Orléans et seigneurs (entre autres lieux) de Chenailles, du Dhuy et des Barreaux, ont, pendant plus de deux siècles, compté parmi les grandes familles du Val de Loire, rempli d'importantes fonctions à la Cour ou au Parlement, défrayé la chronique politique, religieuse et littéraire »[7].

Anne et sa femme étant fidèles au protestantisme, il a été difficile de retrouver les actes de baptêmes de leurs différents enfants, notamment les actes de l’église protestante de la Barre à cette période sont introuvables.
Un garçon et 4 filles, très vite orphelins de père, naissent de cette union sans être sûr de leur ordre d’arrivée : 

Le 16 décembre 1647 Anne de Chivré acquiert de Charles de Montesson la terre, fief et seigneurie du Plessis-Bourel. La vente se fait devant Pierre Briand et Jean Gaultier notaires royaux du comté du Maine[8]

Cette même année Anne Vallée hérite avec son frère Claude des deux tiers de la succession de leur oncle François Vallée seigneur de Chenailles. 

En 1649 Anne de Chivré se range du côté des frondeurs en Anjou s’opposant à la régente Anne d’Autriche et à son ministre Mazarin. Il devient un des principaux lieutenants du duc de La Trémoille qui lui donne commission le 23 mars 1649 « de lever deux mil hommes de pied armés dans les provinces du Maine et d’Anjou, desquels il est constitué mestre de camp … et par les dittes présentes, il est établi lieutenant gouverneur au château et ville de Château-Gontier. »[9]. Le château d’Angers et la ville sont assiégés par les frondeurs, le calme revient quelques jours plus tard début avril une fois les angevins informés de la paix de Rueil.

Suite à la convocation des Etats Généraux décidée par la régente en mars 1651, le duc de Rohan propose pour représenter la noblesse en Anjou le chevalier de Jarzé et « le marquis de La Barre, ancien lieutenant de La Trémoille, fort compromis par la part qu’il avait prise en 1649 au soulèvement d’Angers. … Le fait est que plus de cent cinquante gentilshommes, présents à l’élection, déclarèrent ne pas reconnaître La Barre et Jarzé comme députés de leur ordre. Le choix du premier était inadmissible, dirent-ils, en ce que La Barre était huguenot … le conseil d’état s’empressa d’annuler la nomination de la Barre et de Jarzé. »[10].

La non-tenue des Etats-Généraux décidée par la régente en cette même année 1651 et la fronde levée par Condé amène de nouveau le soulèvement de l’Anjou. Le gouverneur de la province Henri de Rohan-Chabot prend parti pour Condé et vient occuper la ville d’Angers. « Quelques-uns comme La Barre, amenèrent leurs canons. Ce personnage, qui avait déjà tenu une place importante dans la fronde angevine de 1649, se retrouve encore au premier rang dans l’armée de Rohan. »[11].
En février 1652, Mazarin, par l’intermédiaire du maréchal d’Hocquincourt, décide de faire le siège de la ville d’Angers. Peu à peu les frondeurs perdent du terrain et des négociations s’entament fin février pour leur reddition. « Penser d’abord à soi, telle était à cette époque la devise des princes et des seigneurs rebelles. C’était apparemment celle du chevalier de Jarzé, qui s’était laissé prendre à la Pointe. N’était-ce pas aussi celle du marquis de La Barre ? On peut le croire, car une gazette secrète du temps dit positivement que dans les derniers jours du siège ce fougueux frondeur sollicitait les angevins de se rendre. Nous savons d’autre part qu’il fut fort bien traîté dans la capitulation ; la Cour lui permit d’emmener ses canons. »[12].
Les articles de la capitulation signée le 28 février 1652 entre le maréchal d’Hocquincourt et le duc de Rohan mentionnent notamment « réservé cinq pièces de fonte qu’il sera permis à M. le marquis de La Barre de faire retirer en sa maison. »[13]

Anne continue sa lutte en d'autres lieux. Il est fait prisonnier à Gien en avril 1652[14], puis on le retrouve conduit à la Bastille le 16 mars 1653[15].

Anne de Chivré, environ 32 ans, s’éteint avant le 13 mai 1653, selon un acte de procédures faisant « apposition de scellés et inventaire sommaire de mobilier au château de la Barre, en Bierné, à la requête de dame Anne Vallée, veuve d’Anne de Chivré marquis de la Barre … cet inventaire est fait en présence de la dame de la Barre, de Claude Vallée (son frère) seigneur de Chenailles, de Gédéon de Chivré seigneur baron de Mélian, et de Françoise de Chivré demoiselle de la Barre. »[16]. Il est inhumé à la Barre. Peut-être succomba-t-il à la Bastille (voir l'anecdote correspondante) ? 

Anne Vallée élève seule ses cinq enfants dans la religion protestante et doit faire face aux différentes procédures la ruinant peu à peu.
Ainsi en 1665, elle est jugée avec son beau-frère Gédéon de Chivré pour « contraventions à l’édit de Nantes et à l’arrêt du Conseil du Roi, du 21 janvier 1657, commises par les défendeurs en introduisant dans leurs maisons l’exercice public de la religion prétendue réformée, bien qu’ils n’eussent pas la qualité de hauts justiciers à l’époque de l’édit, en permettant que leur unique ministre ait fait le prêche hors de sa résidence et en établissant des temples chez eux. »[17].

Suite à la révocation de l’édit de Nantes promulguée par Louis XIV le 18 octobre 1685 et n’ayant d’autre choix que de quitter le pays, Anne Vallée et ses trois filles Anne, Elisabeth et Françoise, font le 13 février 1686 « abjuration de l’hérésie calvinienne, et ont embrassé la religion catholique aposthollique et romaine … ce qui a esté faict au chasteau de la Barre … »[18]
Anne Vallée et ses deux filles Elisabeth et Françoise rétractent leur abjuration le 29 mai 1687 dans l’église de la Savoye à Londres[19]. On la retrouve un peu plus tard en Hollande où elle crée avec d’autres émigrées des maisons de retraite[20].

Anne Vallée décède en 1694, puisque en juin de cette même année une pièce des archives du Loiret parle de « scellé après décès d’Anne Vallée, femme de feu Anne de Chivré, marquis de la Barre, lieutenant général de l’artillerie de France, et sœur de Claude Vallée, chevalier, seigneur de Chenailles, mort civilement comme ayant quitté le Royaume pour cause de sa religion. »[21].

[1] Table ou abrégé des 135 volumes de la Gazette de France par Théophrate Renaudot – T.2 p.247 – books.google.fr
[2] Mémoires de la Commission départementale des monuments historiques du Pas-de-Calais - 1913 - T.3 p.27
[3] Revue des deux mondes – 1883 – T.56 p.736 – gallica.bnf.fr
[4] Registres de tutelles – Paris – côte : AN Y3912A
[5] Archives nationales – côte : MC/ET/LXXIII/370
[6] Une famille de seigneurs du Haut-Anjou : Les Chivré – Jean de Chivré
[7] Association orléanaise Guillaume Budé – Jacques Vallée, seigneur des Barreaux poète libertin orléanais du XVIIe siècle par Jacques Durandeau
[8] Archives départementales du Maine-et-Loire – E 2010
[9] Archives départementales du Maine-et-Loire – E 2010
[10] La Fronde Angevine – A. Debidour – p.177
[11] La Fronde Angevine – A. Debidour – p.230
[12] La Fronde Angevine – A. Debidour – p.249
[13] La Fronde Angevine – A. Debidour – p.253
[14] Journal de Jean Vallier T.3 p.197
[15] Journal de Jean Vallier T.4 p.195
[16] Archives de la Mayenne, série B, 2301
[17] Inventaire sommaire des archives de la Mayenne avant 1790 – V.2 – B.2336
[18] Archives départementales de la Mayenne - Bierné
[19] La Révocation de l’Edit de Nantes à Paris par O. Douen – T.3 p.158
[20] La Révocation de l’Edit de Nantes à Paris par O. Douen – T.2 p.479
[21] Inventaire sommaire des Archives départementales antérieures à 1790 : Loiret


Proches de Anne de Chivré


  1. Jacques de Chivré, seigneur de la Barre (1557-1586) x 1584 Cécile du Monceau (-) GP
    1. Henry de Chivré, seigneur puis marquis de la Barre de Bierné (1585-1638) x 1618 Antoinette de Carbonnel (-1626) P
      1. Anne de Chivré, marquis de la Barre (1621-) x 1645 Anne Vallée (-1694)
        1. Henry de Chivré, marquis de la Barre (1646-1675) x 1665 Marguerite Bodin (-1730) E
        2. Anne de Chivré (1648-) E
        3. Marie de Chivré (-1659) E
        4. Elisabeth de Chivré (1651-) E
        5. Françoise de Chivré (1652-) E
      2. Henry de Chivré, comte de Marensin (1625-) x 1650 Anne-Elisabeth de Couvert, dame de Sottevast (1638-1670) FS
        1. Suzanne de Chivré (1660-1700) x 1685 Jean Cornet, seigneur de Neuville (1648-) N
        2. Gédéon de Chivré, marquis de la Barre (1662-1706) x 1682 Elisabeth de Montfiquet (1652-1714) N
        3. Anne de Chivré, seigneur de Notre-Dame de Blagny (1664-) N
        4. Gabriel de Chivré, seigneur de Notre-Dame de Blagny (1666-) N
        x2 1674 Hélène de la Chapelle (-) FS
        1. Helaine de Chivré (1677-) N
        2. Anne de Chivré (1679-) N
        3. Louise de Chivré (1679-) N
      x2 1626 Françoise Marech de Montbarot (1579-1629) P
      1. Gédéon de Chivré, baron de Meilhan (1628-1688) x 1676 Jacqueline de Béchevel (-1711) FS
      2. Françoise de Chivré (1629-) FS
      x3 1633 Louise Le Clerc de Fleurigny (-) P
    2. Catherine de Chivré (1586-1599) OT
  1. Jacques de Carbonnel, seigneur de Chasseguey (-1631) x Anne de Chaumont Guitry, dame de Chasseguey (1572-1648) GP
    1. Gabriel de Carbonnel (1592-) OT
    2. Antoinette de Carbonnel (-1626) x 1618 Henry de Chivré, seigneur puis marquis de la Barre de Bierné ... P





Proches de Anne Vallée


  1. Jacques Vallée, sieur des Barreaux (-1614) x 1568 Marie de Mareau (-) GP
    1. Jacques Vallée, sieur des Barreaux (-1622) x Barbe Dolu (-) OT
      1. Jacques Vallée, sieur des Barreaux (-1673) CG
    2. François Vallée, sieur de Chenailles (1577-1647) OT
    3. Hector Vallée, sieur de Mérouville (-) x Suzanne Bigot (1600-) P
      1. Anne Vallée (-1694) x 1645 Anne de Chivré, marquis de la Barre (1621-)
        1. Henry de Chivré, marquis de la Barre (1646-1675) x 1665 Marguerite Bodin (-1730) E
        2. Anne de Chivré (1648-) E
        3. Marie de Chivré (-1659) E
        4. Elisabeth de Chivré (1651-) E
        5. Françoise de Chivré (1652-) E
      2. Claude Vallée, sieur de Chenailles (1620-) x 1656 Madeleine Hervart (-) FS
        1. Claude Vallée, sieur de Chenailles (-) x 1682 Marguerite de Monceau (-) N
      3. Hector Vallée (1625-) FS
  1. Nicolas Bigot, sieur des Marais et de la Honville (1558-) x 1588 Marie Garrault (-) GP
    1. Nicolas Bigot, sieur de la Honville (1589-1669) x 1618 Anne de Sarrau (1602-1638) OT
      1. Antoinette Bigot (1619-) x 1634 Henri de Louvigny (-) CG
        1. Hector de Louvigny (1643-1645) C
        2. Antoine de Louvigny (1647-) C
      2. Nicolas Bigot (1620-) CG
      3. Anne Bigot (1621-1682) x 1636 Pierre Tallemant (-) CG
      4. Marie Bigot (1622-1641) CG
      5. Jacques Bigot (1623-1653) CG
      6. Charlotte Bigot (1625-) x 1645 Thomas Galland, sieur de Gondran (-) CG
        1. Auguste Galland (1646-) C
      7. Elisabeth Bigot (1630-) CG
      8. Isaac Bigot (1631-) CG
      9. Henri Bigot (1636-) CG
    2. Marie Bigot (1590-) x Job Causse (-) OT
    3. Françoise Bigot (1592-) x Théodore Bazin (-) OT
    4. Jérôme Bigot (1593-) OT
    5. Jacques Bigot (1595-1653) x Madeleine du Candal (-) OT
    6. Anne Bigot (1598-) OT
    7. Suzanne Bigot (1600-) x Hector Vallée, sieur de Mérouville ... P
    x2 Hélène Guyomar (-) GP

GP : grands-parents - P : parents - E : enfants - OT : oncles et tantes - CG : cousins germains - C : cousins - N : neveux et nièces